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Comment le changement climatique affecte-t-il le profil variétal des vins rouges et blancs

Utilisation de la souche Torulaspora delbrueckiiNSTD pour l’amélioration sensorielle des vins.

Département technique d’Agrovin S.A

Chez AGROVIN, nous sommes conscients que les changements climatiques influencent l’œnologie moderne, rendant nécessaire le développement de produits en accord avec les raisins du XXIe siècle. Ces dernières années, certains changements ont été observés dans le processus de maturation du raisin. Il y a une tendance à la création d’un décalage entre la maturité plus précoce de la teneur en sucre et la maturité plus tardive des arômes et des polyphénols. Il est donc difficile de déterminer le moment optimal de la récolte car, si nous avons le bon degré probable, l’intensité aromatique maximale n’est pas encore atteinte et les tanins sont encore verts. Ce décalage constitue un défi pour les œnologues, car les consommateurs préfèrent les vins aux arômes intenses et frais, aux tanins mûrs et à la teneur en alcool plus faible.

Il faut tenir compte du fait que la teneur en azote du raisin dépend du sol, de la culture, de la fertilisation et de l’irrigation, de la charge, de la variété et bien sûr de l’année climatique. Les conditions environnementales de l’été avant et pendant la véraison sont particulièrement importantes. Des années pluvieuses au printemps, mais des étés très secs, entraînent une concentration plus faible d’azote dans les raisins.

La composition azotée du raisin est un facteur essentiel pour développer les aptitudes qualitatives des vins. Elle favorise l’intensité de l’activité microbiologique pendant la fermentation alcoolique. Le besoin en azote augmente lorsque la concentration en sucres du raisin est élevée, car il faut plus de générations de levures pour les consommer tous, et donc leur demande en azote est plus importante. Les derniers grammes de sucres sont fermentés par une population à la limite de la survie, dans un environnement très alcoolisé, qui, si elle manque des ressources azotées nécessaires, ne peut mener son travail jusqu’au bout.

En revanche, la répartition de l’azote dans la baie est hétérogène et varie en fonction des conditions de culture. La plupart des composés azotés sont situés dans la peau (50-55%), le reste étant réparti entre la pulpe et les pépins. La teneur en substances azotées augmente pendant la période de véraison et diminue au fur et à mesure que le raisin mûrit. Dans les raisins surmaturés vendangés à la recherche de la maturité phénolique et aromatique, qui avec le changement climatique est plus tardive, la fraction azotée diminue drastiquement, et les fermentations de ces raisins sont sujettes à des problèmes de fermentation, non seulement à cause de la concentration en sucres, mais aussi à cause du déséquilibre entre ceux-ci et la fraction azotée.

 

Effet sensoriel de l’alimentation biologique.

 

Genèse d’arômes fermentaires : Les acides aminés sont à la base des composés volatils produits par les levures. Un tiers des alcools supérieurs sont produits au début de la fermentation alcoolique à partir des acides aminés. L’estérification de ces alcools donne naissance à des arômes fruités qui apportent complexité et longévité au vin.

Augmentation des arômes variétaux : Les acides aminés (présents dans l’alimentation biologique) accentuent également la complexité aromatique, augmentant ainsi les registres variétaux. Une bonne nutrition azotée entraîne une performance optimale des enzymes (protéines) responsables de la libération des précurseurs aromatiques présents dans le raisin : les ß-glycosidases et les ß-lyases, augmentant ainsi les registres variétaux du vin.

L’expression aromatique variétale est liée à la présence de thiols variétaux, au-delà des variétés dites à thiols (Sauvignon Blanc, Verdejo), lesquels contribuent au caractère variétal des vins de tous les cépages, tant blancs que rouges.

Les thiols variétaux 4MMP, 3MH et 3MHA sont des arômes déterminants dans les vins blancs et rouges, car, malgré leur faible concentration dans le vin, ils ont un seuil de perception sensorielle bas. Dans le raisin, ces thiols existent conjugués aux acides aminés, sous une forme non volatile. Les levures sont capables d’internaliser ces précurseurs, de les scinder grâce à leur activité β-lyase et de libérer les thiols volatils correspondants.

Dans ce contexte, il a été observé que la plupart des souches de Saccharomyces cerevisiae, ne libèrent qu’un maximum de 10% de ces précurseurs de thiol dans des conditions de fermentation. Cette inefficacité enzymatique nous a conduit à étudier la capacité de libération des thiols variétaux dans différentes espèces non-Saccharomyces.

Au sens de Non-Saccharomyces, sont inclus les différents genres et espèces de levures présents dans le processus naturel de l’élaboration du vin et différents de l’espèce fermentaire par excellence qu’est Saccharomyces cerevisiae.

Ces dernières années, le secteur œnologique s’est tourné vers l’utilisation des ressources offertes par cette diversité biologique. On sait désormais que les propriétés bénéfiques de ces micro-organismes doivent être spécifiées au niveau de la souche et non de l’espèce.

Dans ce contexte, la souche Torulaspora delbrueckii NSTD présente des caractéristiques sensorielles inhabituelles, qui ont été démontrées au cours de plusieurs années de recherche. De plus, cette souche, contrairement aux autres souches de la même espèce, est fortement présente dans la fermentation alcoolique.

Des études préliminaires avec T. delbrueckii NSTD ont montré que cette souche est capable de finir complètement les sucres présents dans le moût, bien qu’elles aient eu besoin de plus de temps que les souches S.cerevisiae, ne laissant que quelques sucres résiduels à 16°C dans certains cas. En ce qui concerne les composés d’intérêt en fin de fermentation, il faut noter que T. delbrueckii NSTD produit des quantités d’acide acétique significativement plus faibles que S. cerevisiae, en raison de sa capacité à fermenter les sucres lentement.

Tout ceci indique la possibilité d’utiliser la NSTD en culture mixte dès le début, avec la souche de S. cerevisiae souhaitée, permettant d’augmenter les registres sensoriels du vin.

 

Le Viniferm NSTD d’Agrovin apporte complexité et intensité aromatique

 

Chez Agrovin, nous évaluons depuis des décennies les effets du changement climatique sur les raisins, en analysant chacune des circonstances dans lesquelles ils se produisent dans les différentes zones viticoles afin d’offrir des solutions adaptées à chaque vigneron, dans le but de l’aider à améliorer la qualité de ses vins, et d’obtenir dans chaque cas le type de vin qu’il souhaite obtenir.

À cette fin, nous avons développé la levure No Saccharomyces Viniferm NSTD d’Agrovin, une souche de Torulaspora delbrueckii sélectionnée pour sa capacité à améliorer la qualité sensorielle des vins. Grâce à cette levure, nous obtenons une augmentation de la complexité des registres aromatiques du vin, tout en intensifiant les qualités variétales. Il se distingue par son fort impact gustatif, qui accentue les sensations de volume et de douceur en bouche, atténue les sensations d’astringence et prolonge l’arrière-goût.

La souche NSTD améliore le caractère variétal grâce à sa puissante activité β-lyase (figure 1), qui se manifeste par la libération de précurseurs de thiol. Parmi celles-ci, la NSTD se distingue par la production de 4-mercapto-méthyl-pentanone (4MMP), descripteurs associés aux notes de buis ou de fleur de genêt.

Actividad beta liasa de levaduras no saccharomyces

Figure 1. Activité β-lyase de différentes levures non-Saccharomyces. Les différentes souches d’une même espèce présentent une activité enzymatique β-lyase différente. L’activité B-lyase de la souche Torulaspora delbrueckii Viniferm NS-TD se distingue. Belda et al. (2006) [4].

 

Les souches de Saccharomyces à caractère thiol sont des productrices de mercapto hexanol (3MH ou 3SH) ou de son acétate (3MHA ou 3SHA), aux arômes fruités caractéristiques (pamplemousse, fruit de la passion). Par conséquent, la combinaison de Saccharomyces à caractère thiolé en culture mixte avec la souche Torulaspora delbrueckii NSTD, implique une augmentation globale des descripteurs thiol caractéristiques (Figure 2).

Concentracion de tioles

Figure 2. Concentration des thiols, 3MH et 4MMP (ng/L), après fermentation en utilisant S. cerevisiae et en combinaison avec la souche NSTD.  Belda et al. (2006) [1]. ScD : Viniferm Diana ScR :  Viniferm Revelación Td…D : Culture mixte : Viniferm NS-TD + Viniferm Diana Td…R:  Culture mixte : Viniferm NSTD + Viniferm Revelación

 

Ce travail étudie l’effet d’une souche industrielle de Torulaspora delbrueckii Viniferm NSTD sur la production de thiol pendant la fermentation de vins blancs et son impact sur le profil sensoriel du vin.

On observe que les souches de Saccahromyces cerevisia et Viniferm Diana et surtout Viniferm Revelation, toutes deux sélectionnées pour leur forte activité ß-lyase, sont capables de libérer une concentration significative de 3MH (3SH), des registres sensoriels des fruits tropicaux et à noyau qui augmentent le caractère fruité.

Lorsque l’activité de ces souches est combinée à celle de T. delbrueckii Viniferm NSTD, on observe en outre une forte augmentation de la concentration en thiol 4MMP (4MSP) avec un impact direct sur le profil aromatique des vins, augmentant l’intensité et le caractère variétal avec des notes florales et herbacées positives (Figure 3).

Fermentacion sobre mosto verdejo

 

 

Figure 3.  Fermentation sur moût de Verdejo, avec S. cerevisiae ou en combinaison avec la souche Viniferm NSTD.  Belda et al. (2006)   ScD : Viniferm Diana;  ScR : Viniferm Revelación Td…D : Viniferm NSTD + Viniferm Diana ; Td…R : Viniferm NSTD + Viniferm Revelation La combinaison de la souche Torulaspora dellbrueckii (Viniferm NSTD) et de Saccharomyces à caractère thiol (Viniferm Diana ou Viniferm Revelation) en culture mixte ou séquentielle implique une augmentation globale des descripteurs thiol caractéristiques. En ce qui concerne les composés d’intérêt à la fin de la fermentation, il convient de noter que T. delbrueckii produit des quantités significativement plus faibles d’acide acétique que S. cerevisiae, en raison de sa capacité à fermenter les sucres lentement.zz  L’activité combinée de Viniferm NSTD avec une souche de Saccharomyces cerevisiae, réduit la teneur réelle en alcool. On observe une augmentation de la teneur en polysaccharides du vin, notamment en mannoprotéines, ce qui accroît la sensation de volume en bouche.

 

Les résultats montrent la capacité de T. delbrueckii Viniferm NSTD à augmenter la concentration des thiols variétaux dans les vins en co-fermentations avec S. cerevisiae. L’application de NSTD en culture mixte augmente également la teneur en esters fermentaires, intensifiant les registres floraux (Figure 4).

 

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Figura 4. Concentration d’esters fermentaires (mg/l), après fermentation en utilisant la levure S. cerevisiae et en combinaison avec la souche NSTD.  Belda et al. (2006) [1]. ScD : Viniferm Diana ScR :  Viniferm Revelación Td…D : Culture mixte : Viniferm NS-TD + Viniferm Diana Td…R:  Culture mixte : Viniferm NSTD + Viniferm Revelación. La combinaison de la souche de levure Saccharomyces cerevisiae avec la souche Viniferm NSTD entraîne une augmentation de la teneur finale en esters fermentaires.

 

Viniferm NSTD. Structure en bouche et profondeur dans l’arrière-goût.

 

On observe une augmentation de la teneur en polysaccharides du vin, notamment en mannoprotéines (figures 5 et 6), ce qui augmente la sensation de volume en bouche. Cette augmentation des polysaccharides joue également un rôle dans la stabilisation précoce de la matière colorante et réduit l’astringence.

 

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Figura 5. Augmentation de l’indice d’éthanol, reflétant la quantité de tannins combinés aux polysaccharides. Plus la valeur est élevée, plus la matière colorante sera stable et plus l’astringence sera faible. Belda et al. (2006) [1]. ScD : Viniferm Diana ScR :  Viniferm Revelación Td…D : Culture mixte : Viniferm NS-TD + Viniferm Diana Td…R : Culture mixte : Viniferm NSTD + Viniferm Revelación. Comme on peut le constater, l’inoculation mixte produit des taux plus élevés que la fermentation avec une seule souche de S. cerevisiae.

 

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Figura 6. Augmentation de la teneur en mannoprotéines lors de l’utilisation de la fermentation mixte (Sc+NS-TD) par rapport à l’utilisation de Saccharomyces seulement (Sc) Belda et al. (2006) [5]. ScD : Viniferm Diana ScDXNSTD : Culture mixte : Viniferm NS-TD + Viniferm Diana. La fermentation mixte produit plus de 30% de mannoprotéines en plus que la fermentation conventionnelle

 

Viniferm NSTD : adaptée aux vins du changement climatique.

 

L’activité combinée de la NSTD en culture mixte avec une souche de Saccharomyces cerevisiae réduit la teneur en alcool réelle. Les vins obtenus ont une acidité volatile plus faible (tableau 1).  En outre, étant donné la nature des arômes exaltés par ce cépage, tant la complexité aromatique que les descripteurs liés au fruit frais et au caractère variétal sont accentués, ce qui donne une plus forte sensation d’équilibre et de fraîcheur.

 

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Tableau 1.  Production d’acide acétique et titre alcoométrique après fermentation avec Saccharomyces cerevisiae (ScD Viniferm Diana) et après fermentation mixte de la même souche avec NSTD. Belda et al. 2017 [1].

 

Viniferm NSTD convient pour le travail quotidien en cave. D’un point de vue fermentaire, l’activité de Viniferm NSTD est également inhabituelle par rapport à celle des autres souches non-Saccahromyces, puisque, comme mentionné ci-dessus, elle présente une prévalence plus élevée que celle habituelle pour ce groupe pendant la fermentation alcoolique. Cela signifie qu’elle peut être incorporé dès le départ avec la souche de Sacchromyces cerevisae souhaitée, sans qu’il soit nécessaire de rendre cette dernière dépendante du développement de la première. De cette façon, il y a moins de risque de déviations dues à d’autres microorganismes (bactéries lactiques, Brettanomyces) qui pourraient profiter de la situation pour augmenter leur population et provoquer des situations problématiques à l’avenir. De plus, le contrôle du processus de fermentation est exempt de complications supplémentaires liées à l’application séquentielle de micro-organismes, telles que la concurrence pour les composés azotés ou les différences de températures de fermentation optimales.

Son activité fermentaire atteint une conversion probable de 10 degrés, ce qui permet de l’utiliser pour la production de vins doux naturels ou dans la première fermentation de la production de vins mousseux.

En résumé, le travail simultané de la souche NSTD de Viniferm avec des souches de S. cerevisiae est proposé, afin d’augmenter le caractère variétal des vins, pour obtenir des vins plus aromatiques, plus volumineux, plus structurés, et en définitive plus complexes.

 

 

Bibliographie :

  • [1] Influence of Torulaspora delbrueckii in varietal thiol (3-SH and 4-MSP )release in wine sequential fermentations. Belda, I, Ruiz, J, Beisert, Navascués, E., Marquina, D. Calderón F., Rauhut, D., Benito, S. Santos, A. International Journal of Food Microbiology 257 (2017) 183–191
  • [2] Microbial Contribution to wine aroma and Its Intended Use for Wine Quality Improvement. Belda, I., Javier Ruiz , Adelaida Esteban-Fernández,, Eva Navascués, Domingo Marquina, Antonio Santos, M. Victoria Moreno-Arribas. Molecules 2017, 22, 189.
  • [3] Outlining the influence of non-conventional yeasts in wine ageing over-lees Belda, I., Navascués, E., Marquina, D., Santos, A., Calderón, F., Benito, S Yeast 2016. 33 329-338.
  • [4] Improvement of aromatic thiol release through the selection of yeasts with increased β-lyase activity. Belda I., Javier Ruiz , Eva Navascués , Domingo Marquina , Antonio Santos International Journal of Food Microbiology 225 (2016) 1–
  • [5] Dynamic analysis of physiological properties of Torulaspora delbrueckii in wine fermentations and its incidence on wine qualityBelda,I., Navascués, E., Marquina, D., Santos A. Calderón, F., Benito, S. Applied Microbiology and Biotechnology 02/2015; 99(4):1911-1922. DOI:10.1007/s00253-014-6197-2.

 

REMERCIEMENTS

Ce travail fait partie du projet NUTRIAROMA (IDI-20160102), financé par Agrovin S.A. et le CDTI (ministère de l’Économie, de l’Industrie et de la Compétitivité).

 

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