Les tanins œnologiques sont des composés phénoliques d’origine végétale qui jouent un rôle
fondamental dans la structure, la stabilité et l’expression sensorielle des vins. Naturellement présents
dans les parties solides du raisin (peaux, pépins, rafles) ou ajoutés de manière exogène, les tanins sont
passés du statut de composant passif du vin à celui d’outil stratégique de l’œnologie moderne.
La recherche de profils organoleptiques différenciés, la nécessité de compenser les déséquilibres dus au
changement climatique et l’évolution des goûts des consommateurs ont fait des tanins – en particulier
ceux de l’affinage – des alliés essentiels pour obtenir des vins stables, expressifs et adaptés aux différents
marchés.
Classification et origine botanique
D’un point de vue structurel, les tanins sont divisés en deux groupes principaux :
Les tanins condensés
Ils proviennent des tissus végétaux tels que les graines, les peaux ou les tiges. Ils sont constitués de
flavonoïdes polymérisés et leur degré de polymérisation influence leur comportement œnologique
(astringence, réactivité, solubilité). Par exemple, les tanins de pépins ont un degré de polymérisation
moyen de 11, tandis que les tanins de peau atteignent des valeurs de 30.
Tanicol Vintage est un exemple représentatif de tanin condensé : 100 % à base de pépins de raisin, il se
caractérise par sa grande réactivité, son pouvoir antioxydant et sa capacité à améliorer la stabilité de la
couleur.
Tanins hydrolysables
Ils ne sont pas présents naturellement dans le raisin, mais peuvent être incorporés au vin à partir du bois
(barriques) ou par ajout contrôlé. Ils se répartissent en:
Les gallotannins : issus de la tara ou des galles.
Ellagitannins : obtenus principalement à partir du chêne ou de la châtaigne.
Les deux types ont des propriétés antioxydantes, une réactivité contre les protéines et la capacité de
favoriser la copigmentation et la protection des anthocyanes.
Applications technologiques et sensorielles
Stabilisation de la couleur
L’un des principaux défis actuels est de maintenir l’intensité de la couleur des vins rouges, en particulier
dans des contextes de maturité phénolique limitée. L’ajout de tanins condensés et/ou de tanins
ellagiques pendant la fermentation y contribue :
- •La formation de combinaisons stables tanins-anthocyanes (tanins condensés).
- La précipitation des protéines qui pourraient déstabiliser la couleur.
- La copigmentation (surtout par le tanin ellagique).
- Diminution des anthocyanes monomériques (plus oxydables) et augmentation des anthocyanes polymérisées (plus stables).

Figure 1. Équilibre des anthocyanes en fonction du pH (Zamora 2013)
Une étude conjointe d’Agrovin et de l’Université de Turin sur des raisins Barbera a confirmé que
l’utilisation combinée de tanin condensé et de tanin ellagique pendant la fermentation augmente la
fraction colorée en améliorant sa stabilité et réduit l’oxydabilité des anthocyanes.

Tableau 1. Mesure de l’anthocyane total (mg/l) pendant la fermentation (AGROVIN, 2018)
L’ajout de tanin ellagique entraîne une augmentation de la concentration en anthocyanes dès les
premières étapes de la fermentation. Ceci est dû à son effet protecteur contre l’oxydation, la
précipitation des protéines et les phénomènes de copigmentation.
Après la mise en bouteille du vin, les concentrations d’anthocyanes monomériques et totales, obtenues
avec l’utilisation des différents tanins :

Graphique 1. Teneur en anthocyanes totaux et monomères (mg/l) dans les différents essais (AGROVIN, 2018)
Une augmentation de 20 % de la concentration en anthocyanes totaux est observée avec l’utilisation du
tanin ellagique, et de près de 10 % avec l’utilisation du tanin condensé. Avec l’utilisation du tanin
condensé, la concentration en anthocyanes monomères, facilement oxydables, est plus faible.
Ce dernier graphique montre la distribution des anthocyanes dans les différentes phases de
polymérisation.

Graphique 2. Distribution des anthocyanes dans les différentes phases de polymérisation (AGROVIN, 2018)
Il apparaît clairement que le pourcentage le plus élevé d’anthocyanes polymérisées, et donc plus stables
dans le temps, est obtenu avec l’utilisation de tanin condensé.
La conclusion tirée de l’étude est que l’utilisation de tanins a un effet positif sur l’augmentation de la
concentration en anthocyanes, sur la fraction colorante et sur sa stabilisation. Une combinaison de
tanins condensés et ellagiques est le traitement le plus efficace pour obtenir une plus grande
augmentation de la couleur dans les vins rouges.
Précipitation des protéines
Au cours des premiers stades de la fermentation, les tanins peuvent former des complexes avec les
protéines instables du moût. Leur précipitation précoce favorise une vinification plus propre et plus
stable, protégeant ainsi les tanins du raisin. À cet égard, le tanin ellagique est le plus réactif avec les
protéines.
Apporter corps et structure
Les tanins condensés et les tanins ellagiques augmentent l’indice de polyphénols totaux (IPT), ce qui
renforce la sensation de volume, de persistance et de rondeur en bouche. Cette action est
particulièrement utile dans les vins à faible extraction phénolique ou pour les marchés qui exigent des
vins doux et équilibrés.
Alignement sur le profil sensoriel souhaité
Les tanins d’affinage permettent de façonner le style du vin après la fermentation. En fonction de
l’origine végétale et du traitement thermique, des effets spécifiques peuvent être obtenus :
- •Fruit : Red Vintage, Tan Sutil, Tanicol Blanc Excellence.
- Bois doux : Robletan Oakblend (chêne légèrement grillé → vanille).
- Boisé complexe : tanins plus grillés → notes de café et de chocolat (Robletan Coeur et Robletane Icòne).
- Structure sans astringence : tanins de raisin, Tan Sutil, Tan Reactive.
- Douceur : combinaisons avec des gommes arabiques (Gomasol Seda), des mannoprotéines (Mannoplus) et des tanins de vanille.
Œnologie moderne et affinage orienté vers le consommateur
Traditionnellement, l’œnologie partait de la vigne et recherchait la qualité à chaque étape pour ensuite
trouver le bon public. Aujourd’hui, la stratégie est inversée : on définit d’abord le profil sensoriel
souhaité et la niche de marché ciblée, puis on sélectionne les pratiques œnologiques nécessaires pour y
parvenir.
Dans ce contexte, l’affinage des tanins permet d’ajuster le vin au goût du consommateur d’aujourd’hui :
des vins plus doux, au fruit net, au chêne intégré, à la douceur perçue et à la structure ronde.